L'art paysan -s'il semble en apparence sans usage aujourd'hui- est en réalité une clef de compréhension formidable pour éprouver la beauté et le sens originel de cette étrange manière d'être humain que nous appelons art.
Sommes-nous seulement d'accord sur ce que ce mot indomptable voile?
Pour tenter d'y répondre à nouveaux frais, nous arpenterons une collection hors-norme de chefs-d'œuvre ordinaires de l'art paysan de la Suède d'autrefois.
Nos guides seront les mots, le vent, le bois, l'écorce, l'eau, le métal, l'osier, le lait, le pain, qui ont prédestiné à l'éclosion des contours de leur beauté.
À travers ces objets, ce sont bien des relations aux mondes trop oubliées qui resurgissent pour permettre de nous y rapporter.
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Photographies des œuvres par Léang Seng
À la mémoire de mon ami Jean Clavier
« Nous commençons toujours notre vie sur un crépuscule admirable. Tout ce qui nous aidera, plus tard, à nous dégager de nos déconvenues s'assemble autour de nos premiers pas.
La conduite des hommes de mon enfance avait l'apparence d'un sourire du ciel adressé à la charité terrestre. On y saluait le mal comme une incartade du soir. Le passage d'un météore attendrissait.
Je me rends compte que l'enfant que je fus, prompt à s'éprendre comme à se blesser, a eu beaucoup de chance. J'ai marché sur le miroir d'une rivière pleine d'anneaux de couleuvre et de danses de papillons. J'ai joué dans des vergers dont la robuste vieillesse donnait des fruits. Je me suis tapi dans des roseaux, sous la garde d'êtres forts comme des chênes et sensibles comme des oiseaux.
Ce monde net est mort sans laisser de charnier
(...) »
René Char, Le suzerain
Les objets racontent des histoires dit-on. C'est un raccourci, bien souvent nous sommes contraints de les raconter pour eux, trop inconscients que nous sommes des voix qu'ils portent en propre.
Pourtant, de concert avec tout le vivant, les objets sont les acteurs indispensables des manières dont la vie peut se tresser au sein de l'espace et du temps. Sans eux, nos corps, nos pensées seraient sans usage. Sans eux, aucune médiation possible, aucune vie située, aucune position articulée, aucun gestes vitaux, aucun répit, aucun paysage. Aucun espace, aucun temps.
Écouter leurs voix est difficile mais probablement nécessaire pour décrire les métamorphoses systémiques, politiques et écologiques en cours. Cela demande de tordre le langage en tentant de tenir ensemble poïétique et poésie. Cela demande d'opérer des recalibrages permanents et de se poser la question des termes que nous utilisons et qui charrient avec eux des catégorisations, lesquelles aliènent nos facultés de penser et donc de faire face à l'Époque.
Écouter leur voix, c'est rompre avec leur prétendu mutisme, avec leur prétendue immobilité, c'est tenter une approche qui se donne l'attention nécessaire et qui permette enfin de saisir comment les choses s'articulent dans le foisonnement des formes de vie.
Pour ce faire, il nous faut repenser rien de moins que nos mots.
Prologue
Laissez-moi d'abord vous raconter une histoire.
Dans le cours de première année que je mène à l'Université Paris 8, une réaction récurrente ne manque jamais de m'étonner. Durant la séance introductive, je propose parfois aux étudiant.es de tenter d'énoncer ce qu'est -à leur sens- ce phénomène que l'on nomme "Art". Une part non négligeable des définitions proposées tourne autour de la formulation : "l'art c'est ce qui est beau!"
J'aime bien que la beauté soit mobilisée aussi frontalement. Elle est heureusement trop inassignable pour nous servir de point de départ constructif. J'oppose donc à cela que l'on qualifie de beau n'est pas nécessairement -on en conviendra- l'apanage d'une pratique humaine, ce dont le moindre recoin de la Terre à l'abri de l'humanité témoigne assurément.
Quelqu'un tente de préciser "alors disons plutôt : ce que l'humanité fabrique de beau pour le plaisir du beau, au-delà de ce qui est purement nécessaire". Ne nous voilà pas plus avancé sauf à saisir ce qui serait "purement nécessaire", et pour qui.
La première fois, j'ai été très étonné, et il me faut encore aujourd'hui quelques instants pour arpenter l'imaginaire qui se cache derrière un tel énoncé.
Pour faire avancer le débat, d'autres, parfois, tentent de définir le phénomène art comme une faculté supérieur à une autre faculté connue sous le nom délicieux d'artisanat: l'art serait l'état qualitativement supérieur de cette faculté humaine, le meilleur des productions humaines non soumises aux affres de l'utilité. Quelques têtes opinent en signe d'approbation, d'autres affichent une moue insatisfaite. Certaines prennent cet air résigné qu'alimente le doute sur l’intérêt de tout ça.
Tout cela est glissant mais révélateur.
L'art arpenterait cette ligne de crête alambiquée: il serait ce qui est imaginé en vue de la beauté mais hors du nécessaire, inutile donc -mais important quand même-, dispensable et indispensable pour le moins. Mince alors!
Je me permets alors quelques doutes pudiquement exprimés et propose que nous y réfléchissions ensemble autrement.
Nous touchons en réalité, à cet instant, le cœur des enjeux qui vont ensuite nous guider toute une année dans un arpentage patient: déconstruire ce qui semble échafauder l'essence de l'art dans l'imaginaire de jeunes de 18/20 ans en 2022 pour proposer une autre perspective de l'art, une perspective radicalement engagée et capable de prendre au sérieux l'usage que le monde fait d'une faculté que l'on s'accorde -sans pour autant la saisir- à considérer comme si particulière.
Je cherche d'abord pour cela à disqualifier la distinction utile / inutile et son étrange corollaire: utilitaire / artistique. L'idée est évidemment moins de peser d'un côté ou de l'autre de la balance que d'attaquer directement l'intérêt même qu'auraient de telles distinctions. Ma tâche est d’avoir les égards nécessaires face à la difficulté que certain.es ont malgré tout à considérer des objets quotidiens comme relevant de l'art.
L'objection est assez facile placée à l'endroit de l'utilité / inutilité comme ce qui révèlerait des stades hiérarchisés de l'art: que d'aucuns me prouvent qu'un tableau -essence la plus consensuelle de ce qui est art dans le monde occidental- n'est pas lui aussi utile à l'usage d'un espace, qu'il ne participe nullement et utilement de l'aménagement agréable des espaces de vie.
À l'autre pôle de ce partage insensé, si le bol sert à boire, sa fonction ne saurait l'expliquer seul. Si on ne boit pas un café de la même façon dans une tasse ou dans un gobelet jetable, c'est bien parce que les choses sont toujours des espaces de déploiement d'une attention qui vibre et resurgit dans la joie de l'usage.
Ce que l'on sent intuitivement dans les sensations divergentes de ces deux expériences, c'est que l'industrie du plastique jetable n'expose pas les mêmes raisons d'être ni les mêmes horizons de mondes que le creuset artisanal.
Si le binôme utilité / inutilité apparaît bientôt suffisamment vacillant pour trahir son inconsistance, reste que l'objet s'oppose pour beaucoup à l'œuvre artistique et d'aucun.es opposent souvent que si les bols, les pichets, les paniers et les poupées sont dans les musées (visiblement le lieu le plus évident d'existence de l'art d'après celui ou celle qui parle ainsi) c'est plutôt parce qu'ils témoignent des conditions matérielles d'états antérieurs de l'humanité et pas nécessairement parce qu'ils sont une expression artistique. Vient alors insidieusement se glisser une nouvelle distinction qui sépare le patrimonial du négligeable, l'ethnographique de l’artistique, et par-là, visiblement, une hiérarchie entre le digne ou l'indigne de considération.
C'est une question qu'il faut une nouvelle fois affronter pour mieux la récuser.
Comment en sommes nous venus à faire si culturellement nôtres ces distinctions que les savoirs académiques ont érigé depuis le seizième siècle et qui pourtant ne prévalaient nullement auparavant et ne prévalent nullement encore dans maintes cosmologies non-occidentales? Comment, ce qui était pensé par les institutions académiques comme de nécessaires séparations et hiérarchies entre des disciplines prétendument étrangères les unes aux autres, a peu à peu forgé une plus sournoise discipline consistant à ne pas pouvoir les remettre en cause? (sur ce sujet on peut (re)lire mon intervention dans le cadre du Collège international de Philosophie.)
Postuler pour l'abattement des frontières est toujours une réaction de salubrité. Être -au présent- objet d'usage n’empêche nullement d'être objet d'art. Être -au passé- objet ethnographique n'empêche nullement d'être objet artistique (au risque de continuer à exclure l’essentiel de la création artistique de notre humanité)! Être objet d'art n’empêche nullement d'être aussi document. Et on le verra ici, être paysan.es n'empêche nullement l'humain d'être artiste (employé justement comme adjectif). Robert Musil nous avait prévenu avant Philippe Descola, par-delà nature et culture "aucun objet, aucune personne, aucune forme, aucun principe ne sont sûrs, tout est emporté dans une métamorphose invisible mais jamais interrompue."
Il est alors temps d'affronter le réel, de foncer plus droit vers le sens qui nous rassemblera dans cet amphithéâtre. Comme Jean Dubuffet je crois «que toute création d'art doit capitalement avoir pour effet d'opérer ce transfert de la pensée et du regard porté sur les choses en de nouvelles positions. Toute création d'art valable est philosophique ».
Notre meilleure chance d'éprouver ce qu'est l'art, c'est d'abord de le considérer très simplement comme une qualité d'attention dans des gestes et des usages, conscient.es que l'art ne donne rien mais déclenche: "celui qui regarde (on pourrait aussi dire celui qui fait, écrit, compose, écoute, danse...) est celui qui cherche à saisir la puissance dans l'invisible" comme le dit à sa façon Jacques Rancière.
C'est alors à mon tour de mobiliser une formule face aux étudiant.es : je postule que l'art c'est la magie de faire exister autrement le monde, c'est ce qui expose la pluralité des mondes. Si mes termes n'en sont pas moins questionnables, ils veulent aérer la discussion, ils supposent que l'on discute collectivement de l'art comme d'une pratique humaine, véritablement universelle, qui participe à l'élaboration des horizons de nos vies. "Une œuvre d'art est un coin de la nature vu à travers un tempérament", la formule simple et profonde forgée en son temps par Émile Zola peut résonner aussi à cet instant.
Fidèle à mes engagements, je cherche surtout à faire entendre que l'art est cette matière à abattre les frontières du connu, loin de la sclérose que lui impose sa perception toute moderne et occidentale comme institution du champ de la Culture. J'en appelle alors aux nécessités d'affranchir l'art des carcans qui le rendent si impuissant à sa mission profonde: dessiner toujours les contours des mondes où des vies désirables peuvent s'épanouir.
Je plaide que lorsque l'art trouve sa place ajustée au cœur de la vie quotidienne, il renoue avec sa vocation émancipatrice, avec cette exigence de transformation du monde qui le sous-tend à l'échelle individuelle et collective.
L'art ne peut pas être le décor additionnel des activités humaines et son marché corollaire. L'art n'est pas non plus cet exutoire ou cette distrayante parade à l'usure du vécu que présente sa face mondaine. Il est cette faculté à penser le monde, à forger de nouvelles formes de vies. Il désigne plus simplement et plus largement cette habileté sensible dans la mise en œuvre des pratiques par quoi l'humain assure sa présence au monde. C'est bien l'origine oubliée du sens de l'art que rappelle -à qui l'écoute- son étymologie "ars". L'art est la manière de composer, d'assembler, de combiner des pratiques. Le mot désigne quelque chose qui donne à saisir une coexistence entre l'humain, le vivant, les choses et un milieu.
L'art ce sont donc toutes les formes prises par les choses, les relations, les conversations et les rites qui s'agrègent autour des usages courants, boire, manger, dormir, s'asseoir, discuter, faire la fête, mourir.
L'art, c'est l'intensité qualitative qui auréole certaines pratiques quotidiennes, qui en assure la consistance, c'est la qualification d'une certaine attention dans le faire comme dans l'être.
C'est ce que prend au sérieux le philosophe Giorgio Agamben lorsqu'il énonce: « Le problème de l'art en soi ne peut alors se poser puisque l’œuvre est, précisément, l'espace commun où tous les hommes, artistes et non-artistes, se retrouvent en une unité vivante. »
L'art est donc radicalement quotidien.
Destituer l'art
Dans ce fécond maelström de questionnements sur ce qui fait art, il est un terrain pouvant faire office de phare dans la nuit. Un terrain qui -justement parce qu'il n'a jamais prétendu être art- offre un exemple parmi les plus concrets de ce qu'est l'ars originelle: l'art paysan.
Art radicalement non institué, cet aspect particulier de l'art populaire, de la création non aristocratique, forme un terrain où il n'y a aucun sens à polariser beauté et utilité, quotidien et apparat, privé et public, création et usage.
Dans sa conférence L’art en ploutocratie du 14 novembre 1883, William Morris osait une définition « Je vous demanderai d’étendre l’acception du mot “art” au-delà des productions artistiques explicites, de façon à embrasser non seulement la peinture, la sculpture et l’architecture, mais aussi les formes et les couleurs de tous les biens domestiques, voire la disposition des champs pour le labour et la pâture, l’entretien des villes et de nos chemins, voies et routes : bref, d’étendre le sens du mot “art”, jusqu’à englober la configuration de tous les aspects extérieurs de notre vie. »
En nous interrogeant sur le régime d'attention propre à l'art paysan -l'art de fabriquer des objets pour sa vie quotidienne-, nous touchons ainsi du doigt les manières de communautés qui depuis la nuit des temps ont initié un rapport plus juste et plus harmonieux à l'usage du monde.
Attention, ne nous trompons pas, il n'est pas question de fantasmer le rapport à la terre mais de s'y rapporter autrement. Il s'agit bien plutôt de saisir ce que l'on peut faire d'une ascendance commune. Dépasser le point aveugle de l'illusion d’une paysannerie ancienne parfaitement vertueuse qui s'opposerait à l’agriculture productiviste et à son saccage pour interroger notre passé paysan commun et se demander ce que l'on peut en faire.
Même au sein de la modernité (disons du 16e siècle à nos jours), ces pratiques ont dessiné des usages non prédateurs, des usages qui respectent la vie à toute échelle et savent les liens de dépendance qui unissent tout le vivant. L'Art populaire est un art de l'usage responsable, un usage militant de la vie.
Par son rapport à la matière, au territoire, par l'attention portée au souffle du quotidien, par l'humilité ambitieuse et discrète qu'il suppose, ce que l'on appelle « l'art du peuple, l'art produit par le travail quotidien des humains pour leur usage quotidien », comme le définissait autrement William Morris, forme certainement une des expressions artistiques les plus précieuses de notre humanité.
Nous intéresser à des chefs-d'œuvre discrets de l'art paysan c'est comprendre l’intuition de John Keats affirmant "la poésie de la terre ne meurt jamais", c'est nous donner les moyens de comprendre ce que fut cette matrice originelle des artisanats contemporains comme de certains des grands courants du design notamment dans son visage nordique. C'est rassembler et tenir lié ensemble ce que l'historiographie dominante a constamment tenu à distance : une certaine éthique du faire en dialogue avec la matière et son rapport existentiel à la quotidienneté. C'est rendre justice à la puissance des savoir-faire qui s'exerçaient encore partout sur la planète jusqu'à la séparation menée par les académismes hiérarchisants et l'imposition mondialisée du modèle industriel. C'est entendre ce qu'ils peuvent encore dire, provoquer, à l'horizon du désastre écologique et de la cybernétique triomphante.
Prélude à l'attention
Tout ce que j'agite ici vise aussi à replacer le savoir à sa juste place. Le savoir, ça n'est pas l'intériorisation et l'intégration de règles validées par une quelconque entité dominante. Les savoirs, c'est ce dont dépendent les mobilisation de l'attention. Et ce qui préside à la beauté silencieuse de cet art du peuple c'est bien l'ouverture d'un espace d'attention singulier.
Aucune règle esthétique n'y dominait, aucun goût dominant n'y paradait en réponses toutes faites. Devant un besoin et des matières disponibles l'artisan.e/paysan.e qui exerçait autrefois conjuguait plutôt une foule de question. Ce qui s'exerçait alors dans un projet, c'était la puissance de créer ce dont on a besoin. Cette puissance mobilise l'attention à la matière, à ses propriétés matérielles et plastiques, à son imaginaire symbolique, à des savoir-faire que les compagnonnages transmettaient sans en avoir l'air. Devant la nécessité d'un pétrin pour faire son pain, le paysan d'antan se fait compagnon de toutes celles et ceux qui l'ont précédé devant ce besoin et cette capacité commune à faire le nécessaire pour y répondre : choisir un arbre, l'abattre, en prélever une section, y creuser une coupe en bois, c'est déjà faire son pain, c'est déjà nourrir ses enfants et les voir prospérer. Le savoir est alors ce qu'il est de mieux: une relation dans un écosystème, la reconnaissance de relations d'interdépendances qui obligent et activent l'appartenance commune à un milieu.
Dans la Suède rurale des siècles passés, cette quotidienneté s'inscrit dans une perspective commune à beaucoup d'autres terroirs ruraux. Les formes matérielles de la vie sont très pérennes, les modes importées de la bourgeoisie des capitales européennes -Paris en tête- ne touchent pas les campagnes.
La vie quotidienne se tresse avec les besoins et les rites, usages vitaux, fêtes populaires, célébration des personnes.
La beauté se déploie d'abord dans des objets nécessaires, dans des fonctions attendues. Tel.le paysan.ne habile de ses mains occupe les longues nuits hivernales à préparer le trousseau de la vie fermière: passe-lait, cuillères, écuelles. Fier.es de leur travail, il signent de leurs initiales et datent certains ouvrages qui se retrouvent intriqués aux saisons et au temps qui file. Ceux qui créent savent où trouver la matière nécessaire, choisir une branche, un tronc, le nœud d'une souche ou la loupe d'un embranchement pour tirer le meilleur parti de la beauté présente. Celles qui créent savent préparer ce rouge si singulier que le fer contenu dans la terre de la région de Falun offre à la communauté des humains. Tous savent l'attention et les égards nécessaires à ces emprunts au milieu de vie. Le bois utilisé est célébré ; s'il devait s’abîmer, il sera entretenu, réparé avec une attention qui témoigne d'un haut niveau de conscience du travail exécuté et des obligations que leur existence dicte à ses possesseurs. Le pain quotidien est régulièrement pétri dans les coupes allongées, sublimes navettes profilées que le ciseau dégage d'un large madrier. Il sera la coupe à boulange d'une famille, de plusieurs. Elle est objet de soins foisonnants et reste aujourd'hui encore un héritage de toute ancienne maison.
Dans la ferme, tout est beau de vérité. Le tabouret de traite est à lui seul une leçon exemplaire de fonctionnalisme. Les tamis utiles au vannage des céréales sont des merveilles. Les cotonnades d'un indigo sublime s'harmonisent à la patine "fourrure de lièvre" du bouleau fendu. Il y a de la magie dans certains de ces objets, on dirait les tambours rituels ancestraux des populations de l'Arctique.
Une selle à fromage, des poids, un seau, un simple piège à rat sont autant d'opportunités de saisir la consistance d'un monde qui met tout le soin et la considération exigibles à chacun des usages qui s'imposent à lui.
On est subjugué d'autant de beauté si peu dispendieuse et si nécessaire. Cela nous oblige. En se rendant attentif aux matières, aux assemblages, à la patine du temps, on ouvre un espace de beauté et de vérité insondable. Pour ma part, penché là-dessus depuis longtemps, je suis loin -très loin- d'en avoir fait le tour (et de le partager ici).
Arrivent dans le temps, des moments privilégiés qui scellent les relations et la place occupée par chacun.e dans le monde.
Les hommes taillent des bols exubérants, des coupes noueuses qui célèbrent telle ou telle personne méritante. Quelqu'un se propose de garnir la maison d'un fauteuil qui rendra plus simple l'installation des enfants à la veillée. Une souche en sera la matrice, on la creuse et elle devient un trône pour ceux qui ne cherchent pas à régner.
Ces savoir-faire multiples sont aussi mobilisés dans les fêtes. Le jeune homme qui veut vérifier l’intérêt qu'il pourrait susciter chez une jeune femme du village va lui confectionner un battoir à linge (sic) qu'il met le plus grand soin à décorer, il date le morceau de bravoure, comme pour marquer le jalon d'une rencontre qui prendra le temps qu'elle demande. Dans ce monde, on ne se marie pas par intérêt patrimonial, on croit à l'amour comme toutes celles et ceux qui n'ont que ça à offrir. Fiancé, le gars continuera à offrir des objets décorés à sa compagne pour lui dire pudiquement son affection. Il remettra parfois aussi à son âme-sœur une tête de quenouille, témoignage quotidien de l'importance dévolue à celle qui file la laine et qui prend en charge d'habiller ses proches, de les protéger des rudesses du milieu, de la coupe de la laine jusqu'à la confection des pulls, bottes, c'est elle qui assure ce rôle essentiel.
Les familles possèdent aussi des objets qui demandent des savoir-faire plus complexes. Chaque membre de la communauté possède de multiples boîtes. Dans le foyer, elles servent à ranger les aliments -les petites protègent le précieux beurre- les grandes sont autant de "meubles de rangements", cocons protecteurs des rares richesses matérielles, étoffes, coiffes, habits du dimanche. En voyage, les boîtes se font valises, sacs à mains, porte-dîner. dans les déplacements habituels, on utilise des sacoches et sacs à dos en vannerie d'écorce de bouleau, merveilleux quadrillage qui ne fait que célébrer la matière. Le temps les patine admirablement. De les voir au mur aujourd'hui, séchés de ne plus servir m'étreint au plus profond. Ils sont une beauté aussi vraie que celle de l'arbre qui a confié son écorce.
De même, les paniers en racine de bouleau fabriqués durant les veillées d'hiver accompagnent les gestes de la vie banale ; ils sont l'expression d'un soin admirable, les tressages sont des terrains de jeu où la sobriété camoufle une virtuosité qui sait demeurer humble.
"Parce que si tu ne crois pas au monde, rien ne s’offre à toi." (Nastassja Martin, À l'Est des rêves)
Le choc que fut la découverte de la Suède rurale en 2009, me fit faire l'expérience de cette impression. Les merveilles aperçues dans les fermes, dans les musées ethnologiques sonnaient comme un défi au discours lénifiant du design d'alors. En 2009, cela n'était pas une évidence, la crise de 2008 ne se ressentait pas encore si fortement que bientôt et le besoin de vérité qui accompagne heureusement certains seuils de prise de conscience n'était pas encore si criant.
Pour ma part, le doute le plus fécond s'était insinué dans la trame de mon existence, de nouveaux plis se sont formés faisant que des choses, auparavant séparées et sans connexion, semblaient à présent se rapporter les unes aux autres. ( C'est d'ailleurs à cette époque que j'ai mené un autre projet autour de la Suède, à retrouver ici à l'occasion de cette exposition)
Croire profondément à la puissance destituante de l'art paysan me fut nécessaire pour collecter ces précieuses œuvres paysannes suédoises. Il m'a semblé que le déplacement que cela opérait en moi par rapport à leur équivalent "français" était une double chance. D'une part, cela me permettait de tenir une distance avec les contours de ce qu'était malheureusement devenu depuis sa reconnaissance dans les années 1960 l'art populaire à la française, un art parfois figé, boursouflé dans une vaine nostalgie, complexé de ce qu'il est, en quête d'une reconnaissance posthume de l'art académique qui l'avait pourtant discriminé sans relâche, ou même nié, jusqu'aux travaux pionniers et essentiels de la génération des Georges-Henri Rivière, des François Mathey ou des Jean Favière.
D'autre part, cette rencontre avec l'art paysan suédois fut aussi une opportunité de me risquer au-delà. Au risque d'être sévère en le disant, à y regarder de près, même ces pionniers, avaient en quelque sorte - et à contre-cœur - contingenté l'art paysan au stade du témoignage anthropologique pour lui ménager une place dans les institutions.
Pour ma part, je voudrais au contraire remettre les choses dans une perspective juste. Loin de moi l'idée d'en faire une anthologie, un formalisme à suivre, un horizon plastique, mon idée se tient plus simplement dans la conviction que l'art paysan témoigne d'une manière d'être valable pour tout art. Il dit l'art de composer des mondes.
En modifiant à peine les mots si ajustés de l'anthropologue Nastassja Martin et en déplaçant leur interrogation sur notre terrain d'étude, on peut s'interroger efficacement grâce à elle: "Qu’on se l’avoue ou non, il y a toujours quelque chose qu’on cherche à sauver en consignant (les artefacts) dans nos (espaces de patrimonialisation). Mettons-nous (en vitrine) leurs existences pour les conserver ? Leurs mondes pour les préserver ? Que cherche-t’on a sauvegarder coûte que coûte, quelles formes veut-on sauver-garder arrimées au corps à tel point que, parfois la liminarité de la posture confine à la folie ? Si l’essentiel se trouve véritablement du côté des formes stabilisées, « sauver » devient une réponse à la peur de perdre. (...) Nous aussi sommes à l’orée d'une perte si abyssale que nous en restons stupéfaits. Alors? Reposons la question: vers quoi œuvrons nous? (...) Nos livres et nos restitutions sont-ils appelés à devenir autant de musées où sont conservés les formes stables -et donc rassurantes- des traditions autochtones? Si la réponse est négative, alors leurs manières de vivre recomposés, qui déboussolent les nôtres face aux métamorphoses systémiques actuelles, doivent absolument être repolitisées en même temps que défolklorisées. Il faut entendre les rencontres interspécifiques, les mythes, les rêves et les adresses aux éléments comme autant de façons de dire que le monde pourrait être autre." (In À l'Est des rêves, La Découverte, 2022, pp.277-278)
Ainsi, vu d'aujourd'hui, ce qui m'intéresse dans cet art suédois ancien c'est de voir à quel point ces manières autres sont pour nous une voie à même d'opérer un resurgissement. L'idée, on l'aura compris, n'est pas de glorifier des cultures du passé parce qu’elles ont disparu. Nulle nostalgie, justement parce qu'il est essentiel de refuser la cristallisation de ces manières au risque d'en voir se figer les contours. On ne fige pas des formes perpétuellement en mouvement sans les condamner. L'art œuvrant aux relations vitales dans un écosystème devrait toujours se réinventer, s'améliorer sans perdre de vue les valeurs qui prédestinent à ses nécessités.
Le travail de l'historien véritable n'est pas, dès lors, guidé par la volonté de conservation, c'est un travail d'activation renouvelée de la mémoire pour rendre toujours possible le resurgissement de pratiques et d'agrégats de sens qui ne se seraient pas sclérosés sans l'action cristallisante de multiples dominations.
L'art paysan suédois donne, à sa façon singulière, à saisir l'aura invisible de tout art millénaire. À son contact, on comprend que mépriser la banalité et priser l’extraordinaire n’est qu’un point de vue coupable d'annihiler nos perceptions sensibles. Car ce qui est extraordinaire est loin de tout idéal. Il n’y a pas d’idéal qui surpasse l’ordinaire car l'habituel est l’état ultime des bonnes choses. S'il est valable de l'invoquer, l’idéal de toute beauté ne saurait alors être qu'un idéal de l’habituel. (Yanagi)
L'ethos suédois connait justement un beau mot dans lequel résonne cet équilibre de simplicité : Lagom
Le mot lagom, malgré ses mésusages nombreux, provient d’une ancienne déclinaison du mot lag qui évoque l’idée de loi et où la terminaison du datif pluriel en -um lui confère le sens d'une conformité: « selon la loi ». Il ne s’agit pas d’un sens proprement juridique, mais plutôt d’un sens éthique, d'une valeur partagée et validée par la loi implicite de la communauté.
Dans ce que l'on qualifie de lagom résonne l’idée d’équilibre, de médiété ou de médiocrité dans son sens ancien « ce qui est équilibré, au juste milieu » ou, plus joliment, de ce que le sens commun ressent comme juste et ajusté. Dans le langage courant, le sens du mot a évolué pour signifier aujourd’hui « adapté, approprié, convenable ». Si le mot est malheureusement devenu un faire-valoir des rayonnages de librairies catégorie bien-être, il n'est pas inutile de saisir comment ce sens est incarné dans chacun des objets paysans que la galerie présente aujourd'hui.
Si l'historiographie du design vante depuis bientôt vingt ans le sens de la mesure de l'histoire des scènes scandinaves, cela tient probablement - sans qu'il ne soit jamais identifié - à cet héritage commun d'un art populaire non complexé et non indexé sur les pratiques élitistes et maladivement virtuoses de l'aristocratie académique.
La richesse de toute tradition rurale, c'est sa simplicité, la justesse qu'elle trouve dans la parcimonie des matières, dans les gestes d'accueil d'une richesse frugale mais intense. William Morris définit ainsi ce sentiment commun qui abreuve toutes les pratiques paysannes : « La richesse, c'est ce que la nature nous prodigue, c'est ce qu'un homme raisonnable peut fabriquer pour son usage raisonnable avec ces dons de la nature : la lumière du soleil, l'air pur, la surface préservée de la terre, la nourriture, le vêtement, le logement dans la mesure du nécessaire et du décent ; la conservation de toutes les formes de savoir et la faculté de les diffuser ; les instruments d'une communication libre entre êtres humains ; les œuvres d'art, la beauté que l'humain crée quand il est véritablement humain, volontaire et réfléchi- toutes choses qui participe au plaisir de gens libres, courageux et sains. Voilà la richesse ? Je suis incapable d'imaginer une seule chose digne d'être possédée et qui n'entrerait pas dans l'une ou l'autre de ces catégories. »
En Suède, de la méridionale Scanie à la septentrionale Laponie, l'espace et le temps n'offraient aux ruraux que des matériaux simples, bois de bouleaux et résineux, minerai courant, cuir, paille. Chacun des chefs-d'œuvre de l'art populaire suédois est le témoin d'une transformation respectueuse s'appuyant sur les propriétés du matériau, comme la voix d'une intervention discrète et essentielle qui donne à voir le meilleur des possibles, une forme surgie d'un dialogue serré et attentif entre l'artisan, un milieu et la matière, la vérité de qualités magnifiées par la simplicité du traitement, car comme le disait déjà William Morris dans son industriel dix-neuvième siècle "Dès le début, (les humains) voulurent que leurs maisons et leurs biens personnels fussent à la fois beaux et utiles. À peine le primitif eut-il appris à fabriquer quelque-chose qu'il apprit aussitôt à le décorer. Bien avant l'aube de l'histoire, cet instinct de décoration existait aussi incontestablement qu'aux jours heureux de la Renaissance italienne. (...) Comment expliquer cela ? Pourquoi les hommes se donnaient-ils tant de peine ? Qui le leur avait enseigné ?
Il n'est pas besoin de chercher bien loin le professeur. Tout ce qui vivait ou croissait autour d'eux, les montagnes et les rochers eux-mêmes - « ces squelettes de la terre » comme les appelaient les vikings- avaient le pouvoir de susciter en eux le sentiment diffus de la beauté. » (In Des origines des arts décoratifs, conférence prononcée en 1886.)
En 1936, dans son voyage vers le Nord, l'écrivain tchèque Karel Čapek sent la même évidence « Il a dû en falloir, des longues nuits boréales, pour que les hommes prennent un couteau et se mettent à bricoler, à tailler, à sculpter (…) Que la nature humaine est créative! (…) Des îles Fidji aux confins du cercle polaire, c’est partout la même chose: l’homme n’est pas seulement là pour trouver sa pitance, mais pour représenter le monde et créer des choses -pour leur beauté et pour son propre plaisir ».
Ces choses témoignent remarquablement des diverses manières d'appréhender une beauté déjà présente dans la vie. En sublimant un matériau (terre, pierre, bois, fibres) auquel l'artisan reconnaît des qualités profondes ou en n'intervenant qu'à minima dans la mise en perspective d'une beauté fortuite qui préexiste à sa médiation, il s'agit d'abord d'exposer la beauté de la terre/Terre, de la révéler dans le champ de l'humanité et de la considérer comme la juste évocation d'une commune parenté dans la nature. Ainsi, faire, c'est renouer le dialogue avec les milieux qui nous entourent, converser - c'est-à-dire s'associer - avec les choses de façon loyale, ajustée, fervente, imaginative.
Ce sens de l'art occupe l'espace qui tient ensemble la beauté d'une forme, l'intelligence de la création et l'efficacité d'un usage.
Aujourd'hui, même des siècles ou des décennies au-delà, il en reste la puissance: ces objets apparemment désœuvrés (et non inutiles, cqfd) sont encore œuvres. Qu'importe, posés, accrochés au mur, soclés, ou utilisés à nouveau, ils disent l'ineffable. ils disent que l'art est une modalité et un moment : il n'y art que dans la combinaison qu'une pensée et son geste déposent indistinctement dans une chose pour laisser grand ouvert le champ de sa signification.
Le philosophe italien Giorgio Agamben désigne cela ainsi "l'art n'est que le moyen où l'anonyme que nous appelons artiste, en se maintenant constamment en relation avec une pratique, tente de construire sa vie comme une forme de vie: la vie du peintre, du menuisier, de l'architecte, du contrebassiste où, comme en toute forme-de-vie, ce qui est en question n'est rien de moins que son bonheur." (In Création et anarchie, l'œuvre à l'âge de la religion capitaliste). Si l'on prend au sérieux son corrolaire évident, la dimension d'usage de ces choses, on devrait pouvoir dire la même chose de l'usager : l'art n'est que le moyen où l'anonyme, en se maintenant constamment en relation avec un usage, tente d'habiter sa vie comme une forme de vie. Ce qui est en question n'est rien de moins que son bonheur.
Se pencher ainsi sur ces choses, c'est donc entendre ce qui n'est plus dit (ce qui est dit autrement donc) et tenter de comprendre l'épaisseur d'un moment où n'existait pas encore la distinction à venir entre le dessin (les moyens) et le dessein (l'horizon). C'est aussi témoigner d'une approche qui donne la part belle à la communion du faire et de l'usage comme outils d'existence.
C'est habiter la beauté du monde illimité de l'ars, de la conspiration du vivant et du non-vivant, contre le monde paramétré et confiné de l'économie. Car il y a bien combat. Comme le disais si bien l'architecte finlandais Alvar Aalto « je crois que le combat et l’art, dans ce qu’il a de meilleur, sont au fond similaires, et intimement liés. Sans doute cette mystérieuse relation n’a-t-elle jamais été absente de l’art véritable».
L'art rendu à cette épaisseur oubliée, restitue aux choses leurs significations érodées par l'habitude, par la paresse de la mémoire et par le naturalisme occidental (au sens forgé par Philippe Descola).
L'art est une Voie qui nous introduit à ce qui nous tient le plus à cœur, le sens inépuisable des choses.
Par cette voie, le problème de l'art en soi qui nous occupait au début de ce texte ne se pose plus. Avec l'art du piège à rat, l'art du sac à dos, de la coupe à boulanger, avec l'art du flambeau, du panier ou du bol, l'art est exposé -en vérité- dans son indistinction fondamentale d'avec tout faire.
Pour notre malheur et notre bonheur entremêlés, cette indistinction est comme l'amour véritable. À peine approché, il faut l’alimenter souvent au risque sinon de le perdre. Il faut l'alimenter pour pouvoir l'arpenter. "On ne reconnait vraiment l'existence que de ceux qu'on aime" disait Simone Weil.
Cet état de félicité qui rend possible les égards nécessaires à l'épaisseur du quotidien, on ne cesse de le perdre de vue aussi (perdre de cœur, devrait-on dire). C'est bien pourquoi par-delà le temps, il a fait l'objet d'une quête sans fin de celles et ceux qui en ont eu l'intuition, les amoureux, les parents aimants, les artistes, les amateurs, les jouisseurs de l'instant. C'est bien cela aussi que les chajin du wabi-cha cherchaient à retrouver en l'essentialisant dans la cérémonie du thé au cœur du Japon de la fin du seizième siècle. C'est bien cela que la poétesse agit dans le langage. C'est bien cela que le collectionneur remobilise à chaque fois qu'il fixe son attention sur une pièce dans sa quête infinie. C'est bien cela qui résonne à nos oreilles lorsqu'une musique nous habite, nous innervant de part en part. C'est bien cela que l'urgence de vivre vient révéler lorsqu'on s'y attend le moins. C'est certainement cela qui se rappelle aux parents aimants lorsqu'ils aperçoivent -avec assez de distance- leur enfant arpenter sa propre vie.
Alors regardons-les ces reliques, elles sont bien vivantes, elles sont belles, elles appellent de nouveaux usages, elles appellent nos gestes, nos regards, notre attention. Face à elles, on n’est plus voué à se taire comme devant une vitrine ou un monde perdu, on doit plutôt tenter de cerner les dialogues encore possibles, il faut traduire, multiplier les tentatives pour essayer de faire justice à ce qui a bien lieu, à ce que qu’elles disent, aux relations qui nous relient à elles, même si le sens de ces relations demeure toujours suspendu, même si l'on est d'une certaine manière voué à courir après, trop conscients que "l'art est le dernier lien qui unisse encore l'homme à son passé." (Giorgio Agamben)
Augustin DAVID, septembre-octobre 2022
Merci à toi, Léang, pour la beauté de ta lumière,
Merci à toi, Anne, pour ta complice et nécessaire relecture,
Merci à Wolfgang Sauter et Helen Simonsson pour leurs images du Gotland Bunge Museum (Creative Commons Attribution-Share Alike 4.0)
Merci au Nordiska Museet de Stockholm pour la mise en ligne des superbes images de Nils Keyland, Gustav Heurlin, Axel Sjöberg (domaine public, Licence CC pdm)
Merci à toutes celles et ceux qui ont autrefois fabriqués de leur cœur ces merveilleux objets.