Sélections..Selections

Quelle est la matière de cette joie qui m'étreint lorsque je croise un milan noir d'assez près pour que nos regards se rencontrent; lorsqu'un coléoptère qui m'était jusqu'alors inconnu passe de l'invisible au visible et ouvre un nouveau monde; lorsqu'une mésange bleue s'attarde suffisamment pour que l'on se découvre mutuellement dans un silence complice?

Cette matière c'est l'éclat de notre commune parenté ressentie, éprouvée. C'est l'intuition fertile de notre ascendance commune, d'une vie en partage, d'un territoire commun, et probablement de nombreux affects parmi ceux qui tissent une existence.

Si le regard des modernes a le plus souvent réduit les vivants -non-humains- à un motif, expression tutélaire d'une nature tenue à distance, certains regards artistes et scientifiques ont su être plus pénétrants et témoigner des relations qui se nouent discrètement à l'ombre du déni séparant humain et animal, nature et culture, corps et esprit.

Vivants parmi les vivants, ces artistes ont depuis longtemps témoigné d'une acuité d'attention capable de dire des relations plus intimes que ce que tous les bestiaires et inventaires savants peuvent saisir.
Ce sont toujours moins des leçons anatomiques que le souvenir de rencontres entre terrestres. L'artiste mue en chaman et rend sensible à ses semblables la subjectivité du vivant.


Les œuvres présentées ici, outrepassent chacune à leur manière, les seuils de la vision moderne. Elles laissent respirer des gestes, sentir des mouvements et des usages où s'articulent les vivants, où se lisent ces parentés déniées. Elles disent une position, des qualités d'attention à même de saisir d'autres manières d'être vivants et d'habiter ensemble la Terre.

Et avec elles, apparait ce qui se tient de l'autre côté du miroir de notre humanité.